Voir le dossier Pourquoi mangeons-nous trop?
Voici comment, selon lui, l’industrie alimentaire nous amène à trop manger... et comment nous pouvons nous défendre. |
David Kessler, qui est médecin, avocat et ancien commissaire à la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis, enseigne à l’École de médecine de l’Université de Californie à San Francisco. Dans son dernier livre, The End of Overeating, il a entrepris de comprendre cette force d’attraction qu’exercent les aliments gras, sucrés et salés.
Le Dr Kessler a répondu aux questions de Bonnie Liebman, de Nutrition Action1-2, par téléphone de San Francisco, en Californie.
Pourquoi avez-vous écrit le livre The End of Overeating? |
Dr David Kessler - Il y avait un mystère fondamental que je voulais élucider. Pourquoi est-il si difficile pour un si grand nombre d’entre nous de résister à la nourriture, même si nous n’avons pas faim? Pourquoi ce biscuit aux brisures de chocolat a-t-il tant de pouvoir sur moi? Pourquoi nous adonnons-nous à un comportement contre notre volonté? J’ai commencé à prêter attention à ce que disaient les gens. « Je mange quand j’ai faim, je mange quand je n’ai pas faim, je mange quand je suis heureux, je mange quand je suis triste. » Et je leur demandais : « Comprenez-vous pourquoi? » Et ils répondaient : « Non. »
Les gens se sentent-ils coupable? |
Dr David Kessler - Oui. Et par conséquent, comme il existe beaucoup de désinformation et d’idées fausses, les gens jettent l’éponge en disant : « Je n’y peux rien. » Je voulais aider les gens à comprendre pourquoi il est si difficile de résister à la nourriture. Et pour la première fois, nous avons maintenant les éléments scientifiques nécessaires pour dire aux gens : « Ce n’est pas votre faute, et vous pouvez faire des choses pour contrôler votre appétit. »
Que disent ces données scientifiques? |
Dr David Kessler - D’abord, nous savons ce qui provoque la suralimentation. Nous avons publié un document intitulé Deconstructing the vanilla milkshake ( traduction libre : Déconstruire le lait fouetté à la vanille). Nous nous sommes demandé si c’est le sucre, les matières grasses ou le parfum qui vous pousse à prendre du lait fouetté à la vanille. Nous avons administré à des rats une série de solutions contenant des combinaisons de sucre et d’huile de maïs, des éléments déclencheurs importants. Mais lorsqu’on ajoute des matières grasses à du sucre, on donne une augmentation synergique à ce déclencheur.
Les rats pressaient un levier un plus grand nombre de fois pour en obtenir? |
Dr David Kessler - Oui. Si on combine le sucre et les matières grasses, les animaux feront plus d’efforts pour en obtenir. Ils en voudront davantage. Si on ne donne que du sucre, on obtient une poussée de dopamine, mais si on combine le sucre et les matières grasses, on stimule une plus grande activité cérébrale. Et nous savons que les humains préfèrent le sucre mélangé à la crème, plus que la même quantité de sucre mélangé à du lait écrémé.
Quel rôle joue la dopamine - un neurotransmetteur qui relaie les messages entre les cellules nerveuses - dans la suralimentation? |
Dr David Kessler - La dopamine monopolise l’attention. En tant qu’êtres humains, nous sommes programmés pour nous concentrer sur les stimuli les plus importants de notre environnement. Si un ours entrait maintenant dans votre bureau, votre taux de dopamine bondirait. Si votre enfant était malade aujourd’hui, c’est à cela que vous penseriez. C’est ce qui capte votre attention. Pour certains, l’alcool peut être un stimulus fondamental. Ou les drogues illicites, les jeux de hasard, le sexe, le tabac. Mais pour nombre d’entre nous, c’est la nourriture.
De tous les signaux que contient cette pièce à présent, de toutes les choses auxquelles je peux penser, ces petits biscuits aux brisures de chocolat, là-bas, attirent présentement mon attention. Pourquoi? À cause de mes expériences passées, les biscuits aux brisures de chocolat activent mon cerveau.
Avant que vous en preniez la première bouchée? |
Dr David Kessler - Oui. Je ne les goûte pas. Ce n’est pas une faim véritable, mais l’anticipation qui nous fait manger bien au-delà de nos besoins caloriques.
Et le simple fait de voir les biscuits déclenche le signal? |
Dr David Kessler - Oui, mais le signal peut aussi être déclenché par le lieu, le moment de la journée, ou par le simple fait de monter dans ma voiture. Je pourrais être en train de marcher rue Powell à San Francisco, et me mettre à penser à des bretzels enrobés de chocolats, parce que 6 mois plus tôt, je suis entré dans une boutique de la rue Powell où l’on vendait des bretzels enrobés de chocolat. Je ne m’en souviens même pas, mais la rue même est un signal. Ce signal de la rue stimule l’activation du cerveau et provoque une excitation. Puis, cela entre dans notre mémoire fonctionnelle. On y pense. On en veut.
Lire la suite de l’entrevue : Les aliments multisensoriels : comme une drogue!
1. Liebman, Bonnie. Why we overeat, Nutrition Action Healthletter, Juillet/août 2009, vol. 36, no 6, pp. 3 à 6. Traduit de l'anglais. Reproduit avec l'autorisation du Center for Science in the Public Interest. ©Tous droits réservés.
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